Nageuse russe
Yulia Efimova s’est construit un beau palmarès, mais si elle figure ici au titre de l’olympisme inattendu, c’est en raison de sa participation controversée aux Jeux Olympiques de Rio de Janeiro, en 2016. Championne d’Europe du 200 mètres brasse en 2008, Yulia Efimova s’est révélée au plus haut niveau international lors des Championnats du monde de Rome, en 2009, où elle remporta le 50 mètres brasse. Dès lors, elle va multiplier les performances. Elle est notamment championne du monde du 50 et du 200 mètres brasse en 2013.
Mais, en janvier 2014, on apprend que Yulia Efimova avait été contrôlée positive à la DHEA (stéroïde) en 2013. La Fédération internationale de natation prend alors une décision curieuse: elle inflige à la nageuse une suspension de 18 mois, alors que la norme est de 2 ans en pareil cas. De ce fait, Yulia Efimova peut prendre part aux Championnats du monde de 2015, qui se déroulent à Kazan, en Russie. Là, elle remporte la médaille d’or dans le 100 mètres brasse. Mais, en 2016, l’Agence mondiale antidopage, par l’intermédiaire du rapport McLaren, révèle qu’un système de dopage d’État a été mis en place en Russie. Le Comité international olympique louvoie. Alors que la Fédération internationale d’athlétisme interdit la participation des Russes aux Jeux de Rio, les autres fédérations sont invitées à agir au cas par cas. Néanmoins, il est décidé que tous les Russes qui ont été contrôlés positif durant leur carrière ne seront pas autorisés à prendre part à ces Jeux. Bien entendu, comme cette mesure ne s’applique qu’aux Russes, elle ne tient pas en termes de droit. Yulia Efimova fait appel, et, in extremis, elle est autorisée à participer aux Jeux, à la veille de la cérémonie d’ouverture. À Rio, elle obtient la médaille d’argent dans le 100 mètres brasse et dans le 200 mètres brasse. Sur les podiums, quand on lui passe la médaille autour du cou, elle est huée par le public. Yulia Efimova a donc cristallisé les ressentiments du public à l’encontre des Russes. Pis, concernant ses médailles, le prestigieux Américain Michael Phelps déclare que la présence de Yulia Efimova lui «brise le cœur»
De retour à Moscou, Yulia Efimova fera part de son mal-être : «Je n’ai jamais connu une telle compétition et espère ne pas en connaître de semblable dans le futur. C’était très dur avec la pression de tous les côtés, des sportifs, des supporters et surtout des médias. Ce n’était pas une compétition mais une guerre, une guerre froide.» Deux médailles olympiques valent-elles autant de souffrances? Yulia Efimova s’est sans doute remise, car elle remporta quatre médailles aux Championnats du monde de Budapest en 2017, dont la médaille d’or dans le 200 mètres brasse.
©Pierre LAGRUE